Nos vies se sont croisées un beau dimanche d'août,
Un jour enveloppé d'une chaleur qui envoûte,
Tu traversais ce pont où l'air est inodore,
L'eau si resplendissante luisant des rayons d'or.
Tu semblais si calme, mais tout était si sombre.
Je n'ai su percevoir tes signes de pénombre,
Foudroyé, n'ayant pu lever le moindre geste,
N'ayant pu éviter ce destin si funeste.
Plongés l'un dans l'autre, nos regards ignorants,
Le temps d'un vif passage sur ce pont de dérive,
Jamais tu n'auras pu parvenir à l'autre rive.
Un instant en suspens où le temps larmoyait,
D'opter pour une baignade où l'azur témoignait,
Partir à la dérive, aux eaux du Saint-Laurent.
Était-ce un beau dimanche ou un jour inquiétant ?
Ce n'était pas le temps qui me dégoûtait tant,
J'empruntais ce même pont bleu, unicolore,
L'eau si bleue, si fade, luisait de rayons d'or.
J'incarnais un corps vide qui, sur ce pont, marchait,
J'ai croisé tant de gens me souriant gaiement,
S'ils avaient pu sentir mes vils démons, vraiment,
Leur montrer cet enfer dont ils se détachaient.
L'homme au regard joyeux, le vicieux égoïste,
Alors que j'admirais la noirceur de ces eaux,
Regarde-moi, jeune homme, je suis un libre oiseau.
Toujours accoudé à cette fine rambarde,
Il était enfin temps, ma baignade ringarde :
Partir à la dérive… adieu à toi, Narcisse.